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Cour de cassation de Belgique, C960120N, 6th November 1997

Title
Cour de cassation de Belgique, C960120N, 6th November 1997
Content
LA COUR,

Vu le jugement attaqué, rendu le 25 septembre 1995 par le tribunal de première instance de Termonde, statuant en degré d'appel;

Sur le moyen, libellé comme suit : violation des articles 675 à 680, 688, 689, 690, 706, 2219, 2262 du Code civil et 44 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme et du principe général du droit suivant lequel la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut se déduire que de faits qui ne sont susceptibles d'aucune autre interprétation,

en ce que le tribunal de première instance déclare non fondée la demande du demandeur concernant l'obturation par maçonnage de la façade latérale de la propriété du défendeur, sise au numéro 129, par les motifs que : "La circonstance que celui-ci a installé des vitrines est sans intérêt en l'espèce. Il est apparu des pièces produites que, le 16 avril 1976, la commune d'Erembodegem a délivré un permis de bâtir aux dénommés Van Autreve-D'Hooghe, auteurs de l'actuel appelant. C'est à bon droit que le deuxième appelant fait valoir que les anciens propriétaires n'ont jamais protesté et que ce n'est qu'à présent, sept ans après l'exécution des travaux, que, pour la première fois, l'actuel intimé émet des plaintes. Dès lors qu'il est le fils des anciens propriétaires et qu'en conséquence, il suivait très attentivement la situation, un tel comportement paraît, à tout le moins, étrange dans la mesure où il concerne l'animus de la demande. Eu égard à la sécurité juridique, d'une part, et au silence inexplicable, à tout le moins, inexpliqué de l'intimé ou de ses auteurs, d'autre part, il y a lieu d'admettre qu'il y a "rechtsverwerking" en l'espèce. En outre, il est apparu de la visite des lieux que, hormis la porte d'entrée, la façade latérale de l'immeuble Baeyens n'a pas d'ouvertures. Dès lors, la prétendue impossibilité de louer en raison de l'installation des vitrines de ce côté n'est pas établie. Dès lors, le jugement dont appel doit être réformé et il y a lieu de dire pour droit que (...) les vitrines latérales, qui donnent vue sur le passage à niveau, ainsi que les portes, doivent être considérées comme étant acquises. En conséquence, la demande originaire n'est pas fondée en l'espèce",

alors que la demande du demandeur tendait à obtenir "l'enlèvement et le maçonnage pour boucher toutes les vitrines et portes qui avaient été installées illicitement dans la façade commune, entre l'immeuble de (la demanderesse) et l'immeuble de (l'auteur du défendeur)" (jugement, p. 2); que le fait de délivrer un permis de bâtir au sens de l'article 44 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme ne réduit pas à néant le droit subjectif du voisin à faire procéder à l'enlèvement des fenêtres et jours au sens des articles 675 à 680 du Code civil qui ont été illégalement installés;

que la renonciation à un tel droit ne se présume pas et ne peut se déduire que de faits qui ne sont susceptibles d'aucune autre interprétation; que, conformément aux articles 688, 689, 690, 706, 2219 et 2262 du Code civil, sauf renonciation ou convention entre les parties, ledit droit ne cesse de pouvoir être exercé qu'en raison de la prescription acquise à l'expiration du délai de 30 ans; que, plus spécialement, le défendeur ne peut se prévaloir de la prescription exctinctive de la servitude passive grevant son fond qu'à l'expiration de ce délai et qu'en outre, la prescription acquisitive - aussi acquise ensuite d'une possession trentenaire - ne commence pas à courir tant que le propriétaire du fond servant ne fait que tolérer la situation aggravante; qu'il s'ensuit que le droit des demandeurs n'a pas été réduit à néant ni fait l'objet d'une renonciation tacite en raison du seul fait de leur protestation tardive ("sept ans après l'exécution des travaux"), de la 'sécurité juridique' et de 'leur silence inexplicable, à tout le moins, inexpliqué'; qu'il n'existe pas de principe général du droit suivant lequel ce droit subjectif s'éteint dans de telles circonstances,

de sorte qu'en déclarant la demande non fondée sur la base des motifs précités, le tribunal de première instance ne justifie pas légalement sa décision (violation du principe général du droit cité et des dispositions légales précitées) :

Attendu que le bénéficiaire d'un permis de bâtir n'est pas exonéré de l'obligation de respecter les servitudes que la loi impose en matière de fonds voisins;

Attendu qu'une partie ne perd pas un droit octroyé par la loi en adoptant un comportement contraire à ce droit ou en ne l'exerçant pas immédiatement, sauf en cas d'abus de droit, prescription ou exceptions prévues par la loi;

Qu'il n'existe pas de principe général du droit relatif à la "rechtsverwerking";

Attendu que le jugement attaqué rejette la demande des demandeurs tendant à obtenir l'enlèvement "(des) vitrines latérales qui donnent vue sur le passage à niveau, ainsi que des portes", d'une part, par le motif que les auteurs du défendeur bénéficiaient d'un permis de bâtir et, d'autre part, par le motif que, par leur comportement, les demandeurs ont tacitement renoncé à leur droit;

Que le jugement attaqué fondé sur de tels motifs n'est pas légalement justifié;

Que le moyen est fondé;

PAR CES MOTIFS,

Casse le jugement attaqué en tant qu'il déclare non fondée la demande des demandeurs tendant à obtenir l'enlèvement "des vitrines latérales" et des portes et qu'il statue sur les dépens;

Déclare l'arrêt commun à Robertus Van Autreve;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé;

Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond;

Renvoie la cause, ainsi limitée, devant le tribunal de première instance d'Audenarde, siégeant en degré d'appel.
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