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Cour de cassation Belgique, C970010N, 12th February 1999

Title
Cour de cassation Belgique, C970010N, 12th February 1999
Content
LA COUR,

Vu l'arrêt attaqué, rendu le 2 octobre 1996 par la cour d'appel d'Anvers;

Sur le premier moyen, libellé comme suit : violation des articles 23, 870 du Code judiciaire, 1315, 1349, 1350 et 1353 du Code civil,

en ce que l'arrêt attaqué déclare l'appel recevable et fondé et, par confirmation du jugement dont appel, décide que la demande principale tendant à obtenir le divorce est fondée et, en conséquence, dit que le divorce entre les parties reste prononcé aux torts de la demanderesse, condamne celle-ci à payer au défendeur la somme de 25.000 francs à titre de dommages et intérêts pour appel téméraire et vexatoire et la condamne aussi aux dépens, après avoir constaté que l'adultère est établi dans le chef de la demanderesse et est présumé être injurieux à l'égard du défendeur par les motifs que :

"De la lecture conjointe des déclarations de témoins (...) et des considérations de l'arrêt rendu le 8 décembre 1993 par la première chambre de la présente cour qui est produit (notamment, pages 5 et 6 ... la seule décision qui s'impose est que feu D.G. a eu l'intention d'honorer la relation adultérine qu'il entretenait avec (la demanderesse) ...), découle la preuve de la relation adultérine qui a existé entre (la demanderesse) et le dénommé D.G." et en ce qu'il considère relativement au même arrêt que :

"Nonobstant les allégations de (la demanderesse), l'arrêt rendu le 8 décembre 1993 a acquis force probante à son égard, notamment à titre de présomption réfragable (non renversée en l'espèce) de l'existence d'une relation adultérine entre feu D.G. et elle-même",

alors qu'en matière civile, conformément à l'article 23 du Code judiciaire, une décision judiciaire telle que l'arrêt rendu le 8 décembre 1993 par la première chambre de la cour d'appel d'Anvers n'a autorité de chose jugée que si la chose demandée est la même, si la demande est fondée sur la même cause et si elle est entre les mêmes parties;

que, hormis le cas de l'autorité de la chose jugée, ni le Code judiciaire, ni aucune autre disposition légale, plus particulièrement les articles 1349, 1350, plus spécialement 3°, 1352 et 1353 du Code civil, ni aucun principe général du droit ne prévoient que les jugements et arrêts ont force probante à titre de présomption réfragable, plus particulièrement au bénéfice de tiers qui n'étaient pas parties à ces jugements et arrêts;

qu'en l'espèce, ainsi qu'il ressort de l'arrêt attaqué et qu'il apparaît des conclusions d'appel du défendeur (page 6, b), l'objet de l'arrêt rendu le 8 décembre 1993 était la demande introduite par la demanderesse à l'égard des héritiers D.G. tendant à la délivrance du legs que lui avait fait D.G.;

que cet arrêt n'a pas acquis autorité de chose jugée à l'égard de la demanderesse et du défendeur et il n'a pas davantage acquis "force probante" à l'égard de la demanderesse, notamment "à titre de présomption réfragable" au bénéfice du défendeur, dès lors que le défendeur n'était pas partie à cette décision et qu'en outre, cette décision a été rendue dans une cause qui n'est pas la même que celle qui est actuellement pendante entre la demanderesse et le défendeur,

de sorte qu'en confirmant le divorce sur la base d'une relation adultérine présumée établie, fût-ce conjointement avec des témoignages, en vertu de la foi due à l'arrêt rendu le 8 décembre 1993 par la cour d'appel d'Anvers, alors que cet arrêt n'a pas acquis force probante à l'égard de la demanderesse et du défendeur - même à titre de présomption réfragable - l'arrêt attaqué viole les notions d'autorité de la chose jugée (violation de l'article 23 du Code judiciaire) et de la présomption, plus spécialement la notion de présomption légale (violation des articles 1349, 1350, plus spécialement 3°, et 1353 du Code civil) et renverse la charge de la preuve (violation des articles 1315 du Code civil et 870 du Code judiciaire) :

Attendu que l'arrêt fonde sa décision non seulement sur les enquêtes et l'arrêt rendu le 8 décembre 1993, mais aussi sur le journal de la demanderesse qui, lu à la lumière des témoignages et de l'arrêt précité, est considéré comme étant une preuve suffisante de l'adultère;

Que, dès lors, le moyen est dirigé contre une considération que l'arrêt ne contient pas; que le moyen ne permet pas à la Cour d'examiner le bien-fondé du moyen, sans procéder à l'examen de la valeur probante des éléments, pour lequel elle est sans pouvoir;

Que le moyen est irrecevable;

Sur le second moyen, libellé comme suit : violation des articles 149 de la Constitution coordonnée le 17 février 1994, 1315, 1341 du Code civil, 870, 915, 916, 917, 918, 919, 922, 945, 946, 947, 949, 1042 et 1264 du Code judiciaire, du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et du principe général du droit suivant lequel nul ne peut être déclaré déchu d'un droit subjectif attribué par la loi si ce n'est en vertu d'une loi, tel qu'il est notamment consacré par les articles 860, 862 et 1263 du Code judiciaire,

en ce que, par confirmation du jugement dont appel, l'arrêt attaqué rejette comme étant non fondée la demande reconventionnelle de la demanderesse tendant à obtenir le divorce, par le motif que la demanderesse n'offre pas de preuve autre que la preuve testimoniale dont, également par confirmation du jugement dont appel, l'arrêt déclare la demanderesse déchue, par les motifs que :

"Jusqu'à présent, (la demanderesse) n'a pas déposé de requête contenant la liste des témoins et elle n'a, en conséquence, pris aucune initiative en vue des enquêtes qui lui ont été accordées;

que, ainsi que le premier juge le constate avec raison et que (le défendeur) l'invoque dans ses conclusions déposées le 18 avril 1995 au greffe du tribunal de première instance de Turnhout, un tel comportement révèle une inaction persistante et fautive; que, dès lors, (la demanderesse) n'ayant ni invoqué ni prouvé la force majeure (...), c'est à bon droit que le premier juge l'a déclarée déchue du droit de tenir les enquêtes accordé par le jugement rendu le 28 novembre 1991;

qu'ainsi, il est fait exception à la règle suivant laquelle le juge qui a ordonné une enquête est, en principe, lié par cette décision et ne peut statuer au fond tant que l'enquête n'a pas été tenue;

que les droits de la défense ne sont pas violés lorsqu'une partie est déclarée déchue du droit de tenir les enquêtes accordé par une décision antérieure, ensuite d'une inaction fautive",

alors que, première branche, en règle, le juge qui a ordonné une enquête est lié par cette décision et ne peut statuer au fond tant que l'enquête n'a pas été tenue;

que tant les droits de la défense que le principe général fondamental suivant lequel nul ne peut être déclaré déchu d'un droit subjectif attribué par la loi si ce n'est en vertu d'une loi s'opposent à ce qu'une partie qui, en vertu des articles 1315, 1341 du Code civil, 870, 915 à 919 y compris, 922, 945, 946, 947, 949 et 1042 du Code judiciaire, a été autorisée à apporter la preuve d'un fait par la voie d'enquêtes, soit déclarée déchue de ce droit par le seul motif qu'elle fait preuve d'une "inaction persistante et fautive"; que l'article 1263 du Code judiciaire prévoit la déchéance de l'action en matière de divorce au seul cas où un époux fait défaut alors que le juge a ordonné la comparution personnelle; que la sanction de la déchéance n'est pas prévue en matière d'enquêtes, au cas où une partie fait preuve "d'inaction persistante et fautive",

de sorte qu'en déclarant la demande reconventionnelle non fondée par ce motif, l'arrêt attaqué viole les dispositions et les principes généraux du droit cités au début du moyen (à l'exception de l'article 149 de la Constitution),

seconde branche, dans ses conclusions régulièrement déposées, la demanderesse a contesté la déchéance du droit de tenir les enquêtes demandée par le défendeur, en alléguant

"qu'il ne peut être fait état d'une "rechtsverwerking" et que, dès lors, (la demanderesse) ne peut être déclarée déchue du droit de tenir les enquêtes qui a été accordé par le jugement rendu le 28 novembre 1991;

que ceci impliquerait effectivement une grave violation des droits de défense de (la demanderesse), dès lors que, aucune loi ne prévoyant la déchéance du droit de tenir les enquêtes, celle-ci n'est pas possible"

et alors que l'arrêt attaqué déclare la demanderesse déchue du droit de tenir les enquêtes, sans répondre au moyen invoqué suivant lequel, la loi ne prévoyant pas une telle déchéance, celle-ci n'est pas possible et sans indiquer la disposition légale en vertu de laquelle la déchéance est prononcée, et que, dès lors, il n'est pas légalement motivé (violation de l'article 149 de la Constitution coordonnée) :

Quant à la première branche :

Attendu qu'il n'existe pas de principe général du droit suivant lequel nul ne peut être déclaré déchu d'un droit subjectif attribué par la loi si ce n'est en vertu d'une loi;

Que le moyen, en cette branche, manque en droit;

Attendu que le juge ne viole pas les droits de défense d'une partie lorsqu'ensuite de son inaction fautive, il la déclare déchue du droit de tenir les enquêtes accordé par une décision antérieure;

Attendu qu'en règle, le juge qui a ordonné une enquête est lié par cette décision et ne peut statuer au fond tant que l'enquête n'a pas été tenue;

Que, toutefois, cette obligation s'éteint lorsque la partie à qui la possibilité de tenir les enquêtes a été accordée, omet de le faire de manière persistante et fautive; que le juge qui constate une telle faute ne viole ni les droits de la défense ni les dispositions légales relatives à la preuve testimoniale, lorsqu'il déclare la partie négligente déchue du droit de tenir cette enquête, en raison de cette faute;

Attendu que les juges d'appel constatent l'inaction persistante et fautive de la demanderesse et que, par ce motif, ils confirment la décision du premier juge suivant laquelle la demanderesse ne peut procéder à l'exercice du droit de tenir les enquêtes qui lui a été accordé;

Qu'ainsi, ils justifient légalement leur décision; 

Que le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli;

Quant à la seconde branche :

Attendu que, par les motifs reproduits au moyen, l'arrêt rejette le moyen de défense de la demanderesse et y répond;

Que le moyen, en cette branche, manque en fait;

PAR CES MOTIFS,

Rejette le pourvoi;

Condamne la demanderesse aux dépens.
Referring Principles
A project of CENTRAL, University of Cologne.