289
La jurisprudence arbitrale peut-elle donner une nouvelle chance a la théorie de la perte d'une chance?[...]
292 Si donc la voie d'une reconnaissance de la théorie de la perte d’une chance par la juridiction étatique paraît à ce jour fermée, il reste à examiner si la jurisprudence arbitrale, même tenue d'appliquer le droit suisse par hypothèse choisi par les parties, peut néanmoins par ricochet, pour reprendre une expression de François Dessemontet , contribuer à ce que la juridiction étatique revoit sa position sur la question.
[...]
294
Ainsi en est-il de la sentence CCI No. 8331 où les parties s'étaient expressément référées aux principes UNIDROIT en tant que loi applicable au litige et de la sentence CCI No. 8264 ; à propos de cette seconde sentence, il faut ici rappeler que le droit applicable était le droit algérien, ce qui n'a pas empêché les arbitres d'allouer à la partie lésée des dommages et intérêts non pas sur la base de droit mais sur celle des principes UNIDROIT qui selon eux constituaient des « règles très largement admises à travers le monde dans les systèmes juridiques et la pratique des contrats internationaux ». A l'image de cette sentence, l'arbitre international siégeant en Suisse et tenu d'appliquer le droit suisse, pourrait en présence de situations concrètes du type de celles décrites plus haut se référer aux principes UNIDROIT pour indemniser la chance perdue. Le droit suisse, en effet, est incertain sur la question puisque l'ATF 133 III 462 a jugé « problématique » l'indemnisation de la perte d'une chance envisagée en tant qu'élément du patrimoine du lésé. Au surplus, l'arrêt non publié de ce même Tribunal fédéral dans la cause 4A.227/2007 ne tranche pas explicitement la question dès lors
295
qu'il s’est borné à requalifier la motivation retenue par l'instance cantonale. Il y a donc place pour permettre à la juridiction arbitrale d'appliquer les principes UNIDROIT et partant la théorie d’une véritable perte d’une chance sans pour autant passer outre à la volonté commune des parties qui par hypothèse auraient choisi le droit suisse du moment que celui-ci ne donne pas de solutions claires sur la question. [...]