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ICC Award No. 12456, Collection of ICC Arbitral Awards 2008-2011, at 811 et seq.

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ICC Award No. 12456, Collection of ICC Arbitral Awards 2008-2011, at 811 et seq.
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Sentence arbitrale finale rendue dans l'affaire CCI no. 12456 en 2004

[...]

La méthode employée par le tribunal arbitral décrite ci-dessus est critiquable (P.Mayer, Reflections on the International Arbitrator's Duty to Apply the Law - The 2000 freshfields Lecutre: 17 ARB INT'L 235, 238 (2001)). Nous croyons, comme Pierre Mayer, que les arbitres ont le devoir de trancher le litige qui leur a été confié conformément au droit applicable. La g´néralité des principes évoqués par le tribunal arbitral pour fonder juridiquement sa décision suppose, néanmoins, que, tout au moins indirectement, celui-ci a nécessairement fait référence au droit de l'Etat B, de souche francaise, et au droit suisse (V., par ex., à l'égard du droit francais, F. Terré et al., Les obligations: Dalloz, 9 éd. 2005, § 439 et s.). Le tribunal arbitral, en effet, fonde sa décision sur les principes suivants: (i) l'adage pacta sunt servanda; (ii) la présomption de compétence et de professionnalisme des marchands internationaux; et (iii) le principe de la bonne foi. Sans qu'il ne soit opportun de revenir sur la controverse théorique désormais dépassée qu'a suscitée la lex mercatoria, l'inutilité de la méthode peut être ici soulignée, hul ne doutant de l'existence de tels principes au sein des droits choisis par les Parties. En revanche, les conclusions auxquelles le tribunal arbitral parvient, du fait de l'application de ces principes, méritent d'être décrites. 
Il est tout d'abord certain, pour le tribunal arbitral, qu'un contrat international dont le langage est dépourvu d'ambiguité et passé par des commercants internationaux doit produire tous les effets juridiques résultant d'une force obligatoire plus ou moins sacro-sainte, Pacta sunt servanda (V.C. civ. francais, art. 1134).

[...]

La lecture de la sentence suggère ensuite, même si ce principe n'y est pas nommé expressément, que les marchands internationaux sont présumés être des professionnels compétents. La population de la societas mercatorum n'a pas d'incapables. Ce principe, reconnu maintes fois par les arbitres CCI.

[...]

Premièrement, ce principe semble sous-tendre le renforcement, dans la lex mercatoria, de la force obligatoire du contrat international. L'adage pacta sunt servanda doit, en effet, être appliqué avec davantage de rigueur aux contrats internationaux. Il est certainement très difficile en matière commercial internationale d'échapper à la lettre d'un contrat afin de lui substituer la volonté rélle et commune plus ou moins cachée des parties. La demanderesse A n'a pas réussi en l'espèce. 
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C'est enfin la motivation du tribunal arbitral découlant du principé de la bonne foi qui soulève le plus d'intérêt. Le coeur du raisonnement du tribunal arbitral répose, en effet, sur ledit principe et trois de ses corollaires les plus célèbres (V. également Sentence CCI rendue dans l'affaire n° 10671: JDI 2006, n° 4, p. 1443 et s.).
Le tribunal arbitral considère d'abord que le comportement de la demanderesse A est, quant à la validitè du Contrat de cession de créance, contradictoire. Il se demande, en effet, si <<[l]a contradiction flagrante existant entre d'une part le texte clair du Contrat, dans son titre comme dans ses diverses dispositions, ainsi que les autres textes signès par la Demanderesse, et, d'autre part, les arguments aujourd'hui soutenus par elle à l'appui de sa demande contre [B], suffit-elle à justifier le rejet de la demande comme tèmèraire et mal fondèe, et ceci par exemple au nom du principe de la bonne foi et de l'adage "non venire contra factum proprium"? >>. Une réponse affirmative devrait, à notre avis,être apportée à cette question. Il est, néanmoins, important de souligner, en passant, que le tribunal arbitral ne se contente pas d'y répondre mais, dans un souci d'exhaustivité et conscient de son devoir de persuader la partie perdante d'accepter sa décision (sur ce devoir, V. E. Silva-Romero, Wittgenstein et la philosophie du droit: OUF 2002, n° 245, p. 309 et s.), traite tous les arguments soulevès par les parties dans l'arbitrage.

Le tribunal arbitral applique ensuite, même s'il le fait implicitement, le principe de l'interdiction de se prévaloir de sa propre turpitude (nemo auditur propriam turpitudinem allegans). La sentence, en effet, dispose qu'<<[i]l y a lieu de relever en passant que, dans l'hypotèse où il serait étabil que [C], le cessionaire, ne s'est pas acquitté, ou pas acquitté complètement de ses obligations envers le cédant [A], le Tribunal arbitral devrait non seulement s'étonner de la passivité ou de la mansuétude de la Demanderesse envers le débiteur [C], mais constater qu'il n'a pas été expliaqué ou démontré en quoi l'inexécution de cette obligation serait, vu les termes du Contrat du 5 juin 1998, opposable à [B], ou affecterait la validité de la cession >>.
Le tribunal arbitral développe enfin des observations très intéressantes, sur la base des opinions juridiques des experts présentées par la demanderesse. A, sur la théorie de l'abus de droit. La demanderesse, en effet, prétendait se prévaloir d'une clause contractuelle qui, non sans ambiguité, semblait exiger que toute cession devait être précédée par l'approbation de l'État B. Le tribunal arbitral suit le bon sens. Pour lui, la demanderesse A n'aurait pas d'intérêt légitime à se prévaloir d'une clause dont le but est de protéger l'Ètat B, débiteur cédé. Il conclut que, <<[d]ans ces conditions, il est patent que la Demanderesse n'a ni étabil ni rendu vraisemblable un intérêt légitime quelconque à se prévaloir d'une absence de consentement préalable. Et cerci d'autant mois qu'elle a déclaré elle-même à plusieurs reprises n'avoir jamais demandé le consentement de [B], une abstention surprenante de la part d'un créancier cédant qui serait convaincu de la nécessité de ce consentement pour que la cession sout valable. En prétendant utiliser à son profit les seuls droits du maître de l'ouvrage qui découlent de l'article 3 du Marché, et b´néficier de la non-réalisation, qui lui est due, d'une prétendue condition de validité de la cession, elle commet un abus de droit >>.

827 [...]

II. - Au regard de son devoir de presuasion, le tribunal arbitral, parmi tous les arguments soulevés par la demanderesse A et analysés, se penche sur certains d'entre eux basés sur l'équité. Les idées de justice et d'équité, en effet, se trouvent toujours derrière le droit positif et, plus particulieèrement, derrière le principe de la bonne foi et ses corollaires commentès ci-avant.
afin de trouver une solution qui lui soit favorable au-delà du droit.
Le tribunal arbitral, néanmoins, est de l'avis que la demanderesse A invoque en dernier ressort l'équité afin de trouver une solution qui lui favorable au-delà du droit. La stratégie était, désespérée. Le tribunal la réfute en soutenant qu'<<"[i]l suffira de constater ici que le Tribunal arbitral a recu pour mission de juger en droit et n'a pas recu des Parties les Pouvoirs d'amiable compositeur ou de juge d'équité [ . . . ] À supposer même qu'il en soit autrement, le Tribunal ne discerne pas en quoi l'équité pourrait affecter les conclusions juridiques énoncées plus haut. En particulier, on voit mal comment [A], cédant d'une créance contre l'État défendeur dans les termes et les conditions que l'on sait, pourrait reprocher à cet État de s'être fondé sur la situation et les textes juridiques ainsi créés et prétendre de lui à une comprensation quelconque, au nom de l'équité, parce que le cessionnaire [C] aurait commis une "escroquerie" ou ne l'aurait pas payé, ce qui n'a du reste pas été prouvé >>.
Le tribunal nous rappelle que le droit et l'équité ne sont pas des termes antonymes. Bien au contraire, l'équité, ainsi que l'a trés bien résumé Aristote (Aristote, Éthique à Nicomaque, V, 14, 1137 b, 10-30, Paris, Vrin, 1994) et que le suggère le tribunal arbitral, vient compléter et corriger le droit lorsque, du fait de son inévitable formulation générale, son application à un cas d'espèce pourrait entraîner une injustice. Dans l'affaire commentée, toutefois, aucune injustice de la sorte n'a été prouvée. Si la méthode consistant à s'appuyer sur des principes issus de la lex mercatoria était critiquable, celle du recours à l'équité apparaît plus juste. Loin d'être inutile, la référence à l'équité, compirse comme un complément et correctif du droit applicable, permet une souplesse que tant les arbitres que les parties recherchent. 


[...]

828 [...]

Referring Principles
A project of CENTRAL, University of Cologne.